14h. 11 allée de l’Isle-Adam. Une dizaine de locataires sont abasourdis par la nouvelle qui est tombée. Par sms et affichage sur la porte d’entrée, leur bailleur siffle la fin de la prise en charge des locataires sinistrés.
Cela ne leur est pas indiqué selon une formule respectueuse de leur situation qui aurait pu prendre la forme suivante : « Après avoir procédé à toutes les vérifications concernant le bâtiment en matière de sécurité, Plaine Commune Habitat vous informe que vous pouvez réintégrer vos logements dès 16 h ce jour. Compte-tenu de la situation, 8 appartements restent inaccessibles actuellement. Plaine Commune Habitat est pleinement mobilisé pour un retour de tous dans les logements dans les meilleurs délais ».
Et bien non. La formule retenue est sèche, le ton directif, à la limite du comminatoire : « Vous réintégrez votre appartement à partir de 16 h ».
C’est donc à tout le moins cette immense maladresse qui a mis en colère la grosse dizaine d’habitants présents à 14 h devant l’immeuble. Une maladresse symptomatique des multiples ratés, négligences et autres absences de réponses aux questions posées par les locataires depuis l’évacuation de l’immeuble.
Ce n’est pas anodin qu’un immeuble entier soit évacué suite à un sinistre. Raison de plus pour que la plus grande attention soit portée aux informations à fournir aux locataires, à répondre à leurs interrogations, à partager, expliquer le processus de remise en ordre du bâtiment dans la plus grande transparence.
Tout cela a manifestement fait défaut. Les locataires réclamaient depuis plusieurs jours le résultats des expertises menées sur la recherche d’amiante, des questions se posaient sur la structure du bâtiment, des étais ayant été posés dans des couloirs, des questionnements aussi concernant la façade et les matériaux employés. Autant de questions accumulées, restées sans réponse qui ont nourri l’inquiétude de personnes déjà choquées par le sinistre.
Expression plus que maladroite. Communication défaillante. Annonce brutale d’une réintégration des logements dans la précipitation, arrêt des prises en charge le jour même ; tout cela au lendemain d’une délégation en mairie où la cheffe de cabinet du maire renvoyait les locataires à leur assurances individuelles. La coupe était pleine.
La situation telle que les locataires présents décidaient de se rendre immédiatement au siège de Plaine Commune Habitat.
15h 30. Siège de Plaine Commune Habitat. C’est en présence du responsable d’agence, de la responsable en charge de la politique sociale, du responsable du patrimoine et d’un directeur que s’est déroulée la réunion. Ces deux derniers répondant alternativement aux questions des habitants.
L’exercice était difficile. Le responsable du patrimoine et le directeur s’évertuant, se cantonnant à n’apporter que des réponses techniques sans prendre en compte une dimension essentielle : le traumatisme vécu par les habitants, l’absence de communication efficiente de la part de Plaine Commune Habitat, le sentiment partagé par les habitants présents que le bailleur poursuit un objectif avec précipitation : faire réintégrer les logements, mettre fin et éviter les prises en charge coûteuse des hébergements.
Vu l’état des parties communes que chacun pouvait constater peu de temps avant 16h ce mercredi 21 août, il était difficile de convaincre du contraire les habitants. Un « coup de blanc » en cours sur les murs ne suffisait pas à rassurer les locataires.
Convaincre du contraire les habitants ? Difficile car alors que les résultats de l’expertise sur l’amiante sont connus depuis le 16 août, il a fallu ce déplacement d’habitants au siège de PCH pour pouvoir consulter le document que PCH refuse de diffuser. Les résultats des prélèvements effectués s’avèrent heureusement négatifs.
Difficile aussi pour PCH de convaincre puisque l’injonction à réintégrer les logements précède toutes les réponses aux questions posées par les habitants depuis le sinistre et qu’ils leur a fallu se déplacer au siège pour les obtenir.
Le bailleur fait son travail. Avec rigueur sans aucun doute. Il suit un process technique. Applique des procédures, une réglementation. Procède par étapes. Ce que le responsable du patrimoine et le directeur se sont employés à expliquer.
Mais est-ce si difficile pour un bailleur social de comprendre que son rôle ne se limite pas à une approche technique ? Est-il si difficile de comprendre que face à un tel traumatisme pour des familles, elles ont besoin d’être pleinement et régulièrement informées, ménagées, rassurées, accompagnées ?
On retiendra de cette réunion l’aveu du directeur qui suit le dossier : « Communiquer, c’est pas mon métier ».
Il va pourtant falloir que Plaine Commune Habitat tire des enseignements de la gestion sociale, humaine défaillante de ce sinistre qui, comme l’a souligné le responsable du patrimoine, est – heureusement – exceptionnel.
Ne pas se contenter d’une approche technique mais s’attaquer à un vrai sujet : l’attention portée à la transparence et à la transmission de l’information et la prise en compte d’une dimension que résumait l’interpellation d’une locataire : « L’humain vous en faites quoi ? ». Les résidents du 11 allée de l’Isle-Adam en font aujourd’hui une exigence.
Ils ne manqueront pas de le rappeler dès ce jeudi 22 lors de la réunion prévue à 10 h 30 au siège de Plaine Commune. Un rassemblement de soutien est prévu dès 10 h.
PS : les photos accompagnant cet article ont été prises dans l’après-midi du 21 août.