On peut visionner ici l’appel à la réunion du 2 mars.
Le Blog de Saint-Denis – Qu’est ce qui a motivé cette réunion du 2 mars ? La loi immigration toute récente ou quelque chose de plus profond ?
Le groupe femmes du FDSL – Lors de la première réunion du groupe femmes, chaque participante a fait état des difficultés qu’elle rencontrait dans sa structure ou dont elle avait écho. Celles liées ou découlant du statut administratif des femmes ont été jugées les plus prégnantes. A cela se rajoutait la loi immigration dont on ne cessait de parler mais finalement que peu d’entre- nous connaissaient dans le détail. C’est pourquoi la réunion suivante a comporté un temps d’information sur les modifications qu’elle apportait sur le statut des femmes. La loi immigration n’a fait que renforcer finalement, le souhait d’organiser ce premier atelier sur les sans-papiers. Est-ce quelque chose de plus profond ? Certainement. On ne peut pas vivre dans un territoire comme le nôtre sans être confronté aux tracas que posent la régularisation des sans-papiers, au renouvellement des récépissés, des cartes de séjour et à l’obtention de la nationalité française. Sans parler des conditions indignes d’accueil dans les préfectures, les délais d’attente pour obtenir un rendez-vous. La précarité est le lot des personnes en situation irrégulière mais elle touche particulièrement les femmes. Toutes les structures de quartier accueillent, accompagnent, conseillent et orientent des femmes dont le statut dépend en premier lieu de leur époux. Lorsque des difficultés intra-familiales sont présentes, les femmes n’ont pas d’échappatoire et sont contraintes encore plus de les subir.
Avec qui le collectif du Forum a-t-il préparé ce moment d’information ?
Le groupe femmes du FDSL – Ce premier atelier du forum dionysien des solidarités locales a été préparé avec toutes les participantes du groupe femmes. Celui-ci regroupe des personnes qui étaient là à titre individuel et d’autres représentant des structures comme la Coordination 93 des Sans-Papiers, Plaine de Femmes, Bella Association des Femmes Africaines de la Plaine, Africa. La Courneuve, RESF, Solidarité Alimentaire.
Quand on parle de migrants, les images qui nous viennent à l’esprit, celles qui nous sont proposées sont majoritairement des images de migrants et non de migrantes. Comment expliquez-vous cela ? Deux films récents Moi capitaine et Greenborder qui traitent des migrations leur donnent une plus grande visibilité, surtout le second. On ne voit pas les femmes migrantes dans l’espace public, à quoi cela tient-il ?
Le groupe femmes du FDSL – Parce qu’en majorité, les femmes ne font pas le choix de l’exil. Elles suivent où rejoignent le mari.
Ici, elles se cantonnent à la sphère familiale. Elles s’occupent des enfants, de tenir la structure familiale. La question de l’emploi se posera pour elles, une fois les papiers obtenus et les enfants plus grands. Les hommes sont à l’extérieur, au travail, plus soumis aux contrôles policiers. Les femmes qui viennent seules, sont celles qui fuient des situations de mariages forcés, de violences familiales ou encore pour certaines qui ont fait des études supérieures et qui n’ont pas de perspectives dans leur pays.
Même si beaucoup d’entre elles sont en charge du bon déroulement de la vie familiale, elles n’en demeurent pas moins présentes dans la sphère publique pour qui veut bien les voir. Elles sont présentes dans la vie associative en participant à des ateliers d’apprentissage linguistique et aux différentes activités. Elles sont présentes à l’école, dans les commerces, dans la rue, dans les parcs.
Si l’espace public signifie la sphère médiatique, il peut être répondu que l’image des femmes migrantes n’échappe pas à l’invisibilisation des femmes étrangères en général. Elles sont réduites à leur statut administratif.
Quels sont les changements qu’apporte cette loi pour les femmes, les enfants ?
Le groupe femmes du FDSL – La rencontre a permis de constater que de manière générale il n’y a pas de grande différence hommes/ femmes.
Voilà la liste de quelques mesures parmi les nombreuses que comporte la loi immigration, promulguée le 26 janvier 2024 :
- A titre expérimental jusqu’au 31 décembre 2026, délivrance d’un titre de séjour temporaire dans le cadre de l’admission exceptionnelle au séjour « métiers en tension » sans communication du Cerfa remis par l’employeur : prouver 12 mois d’activité au cours des 24 derniers mois dans un métier en tension et justifier de 3 ans de résidence ininterrompue en France.
Les périodes de travail réalisées sous couvert d’une carte de séjour temporaire mention « travailleurs saisonnier », les étudiant-e-s et demandeurs et demandeuses d’asile sont exclues de ce dispositif.
- Actualisation de la liste préfectorale des métiers en tension au moins une fois par an
- Délivrance d’une carte de séjour temporaire mention « Vie privée familiale » de plein droit en cas de dépôt de plainte contre un marchand de sommeil
- Pour répondre aux besoins de recrutement dans les hôpitaux, création d’une carte pluriannuelle « talent-professions médicales et pharmacies » (pour les personnes diplômées en tant que médecin, pharmacien, chirurgien-dentiste, sage-femme dans leur pays d’origine) d’une durée maximale de 4 ans, sous réserve de la signature de la charte des valeurs de la république et du principe de laïcité.
- Création du contrat d’engagement au respect des principes de la République : liberté d’expression et de conscience, égalité femmes-hommes, devise et symboles de la République et respect de l’intégrité territoriale définie par ses frontières nationales.
- Tout titre de séjour peut être refusé ou retiré à la personne qui refuse de souscrire le « contrat d’engagement au respect des principes de la République » ou dont « les agissements délibérés portent une atteinte grave à un ou plusieurs de ces principes et sont constitutifs d’un trouble à l’ordre public »
- Renforcement du niveau de maîtrise de la langue exigé pour la naturalisation, soit niveau B2 exigé
- La délivrance de la carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à un niveau de maîtrise du français
-Les étrangers mineurs ne peuvent faire l’objet d’une décision de placement en rétention
- Création de 3000 places dans les centres de rétention, dont un nouveau centre dans le département du Val d’Oise
- Amendes possibles pour les employeurs embauchant des étrangers sans titre
- La carte de résident peut être retirée aux réfugiés en cas de menace grave pour l’ordre public ou de retour volontaire dans le pays d’origine, même s’ils résident en France depuis plus de 5 ans
- Les personnes protégées deviennent expulsables si elles ont été condamnées pour un délit puni de peines supérieures ou égales à 5 ans d’emprisonnement
- Suppression des protections contre les obligations de quitter le territoire, sauf pour les mineurs. L’OQTF est prise en tenant compte de la durée de présence sur le territoire français, de la nature et intensité des liens avec la France ou des considérations humanitaires pouvant justifier un droit au séjour
Vos prochaines initiatives ? Le rôle du Forum dans la défense de leurs droits ?
Le groupe femmes du FDSL –Les prochaines réunions détermineront les initiatives à venir. Le rôle du forum est d’être un espace de rencontres et de réflexion. Il ne fait pas à la place des personnes. Il sert d’incubateur d’idées, d’initiatives. Il permet de mettre en commun notre intelligence, notre expérience pour construire des alternatives.