Manifestation ce jeudi 23 juin, 19 h devant la mairie pour la sauvegarde des jardins ouvriers à Plaine Commune. Un texte de Jean Bellanger, secrétaire du comité des jardins pour la Plaine.

, par La Rédac’

Nous publions à l’occasion de cette manifestation du 23 juin à 19 h devant la mairie un texte de Jean Bellanger, secrétaire du comité des jardins pour la Plaine paru en décembre 2020 sur le site « Mémoire vivante de la Plaine ». Intitulé tout simplement « Les jardins ouvriers de la Plaine Saint-Denis », il retrace l’histoire économique, politique et sociale de ces lieux porteurs de la mémoire ouvrière, d’une terre d’industrie et de luttes. Un territoire où les jardins ouvriers que ce soient ceux du Fort de l’Est, de la Fosse sablonnière, des Joncherolles, du Cornillon ou de la cité-jardin de Stains témoignent du besoin aujourd’hui encore de prendre soin d’une terre nourricière, de la préservation du vivant et d’une possible sinon partielle autonomie alimentaire.

Les jardins ouvriers de la Plaine Saint-Denis font partie du paysage de Saint-Denis, de la Plaine Saint- Denis et de la proche banlieue de la région parisienne, ils rappellent tout simplement que ce quartier était industriel avec une population ouvrière aux origines très diverses comme l’indique encore le nom de ‘’ La petite Espagne ’’qui jouxte ces jardins dits du Cornillon….

La Plaine a été victime du charcutage électoral de 1986 opéré par le duo ‘’Chirac-Pasqua’’ qui voulait morceler ce territoire de Saint-Denis réputé pour sa résistance insolente…(

Les luttes ouvrières y furent nombreuses marquées par les souffrances de la classe ouvrière : le travail des enfants aux ‘’Verreries-Legras’, l’exploitation des travailleurs immigrés employés dans les industries chimiques mais aussi leur résistance exemplaire comme à SPCI , Procol et Élastomère, le travail des femmes chez Fabrique-Union, Gibbs, Aussedat….
Les conditions de logement étaient également déplorables : Avec Marcel Trillat , grand reporter nous avons dénoncé en 1970 les hôtels insalubres et les caves peuplées de ‘’sans logis’’ rue du Landy et avenue Wilson de la Paine Saint Denis…

Evoquant les jardins ouvriers, comment oublier les luttes et la désindustrialisation ainsi en est-il des 6 ans de luttes de Cazeneuve et de la machine outil…

Voilà ce que rappelle pour moi et pour beaucoup les jardins ouvriers, autrement dit pas seulement de la culture maraîchère mais de hommes , des femmes et des enfants qui vivaient ensemble, travaillaient ensemble, parfois se révoltaient ensemble exigeant des droits pas seulement des promesses apaisantes… Paroles…Paroles…

L’artiste Jean Amblard, dont la fille Hélène, dionysienne de cœur, nous a fait le don des carnets patrimoniaux (2011), illustre bien cette »résistance » dont on retrouve des traces culturelles dans nos cités et dans les mairies de Saint Denis, Pierrefitte, la Courneuve.

Les Assises de la Plaine font aussi partie de notre histoire, même si à mon goût les jardins ouvriers y sont trop peu associés, pendant plusieurs années dans les locaux des Magasins Généraux, Porte de la Chapelle ou Porte d’Aubervilliers il était question de trouver des solutions politiques et financières pour tenir…

Résister ensemble, en plus grand nombre, avec les forces sociales et politiques dans leur diversité paraissait une évidence pour survivre et grandir malgré les conséquences de la désindustrialisation laissant notre territoire plus fragile alors que le charcutage politique allait nous affaiblir politiquement il fallait au contraire se regrouper et réfléchir à partir des réflexions déjà engagées par d’éminents chercheurs dont Gus Massiah sur le ‘’développement durable’’ : trois conditions essentielles s’imposaient : l’économique, le social, l’écologie

Ces trois conditions , valeurs essentielles, nous voulons les retrouver, avec les jardins ouvriers et leur environnement, avec les 23 familles profitant de cet espace, avec les enfants des écoles, avec les médiathèques, avec les associations, les syndicats et leurs comités d’entreprises qui fréquenteront notre espace accueil comme un lieu culturel. Avec Apijbat nous avons en effet créer un espace accueil que certains enfants des écoles dont celles de Epinay sur seine avec le soutien de Aline Matray du dispositif « Imaginaire et jardins » ont visité sous la direction attentive de Claude Abdallah un des plus anciens jardiniers du Cornillon de la Plaine dont le savoir faire, la patience et l’expérience culturelle en ont fait un excellent pédagogue auprès des enfants heureux de l’entendre….

Ensemble nous apprendrons la nature et son évolution comme nous l’avons appris avec Marie-Monique Robin sans pesticides, ensemble nous échangerons avec les cités voisines comme nous l’avons fait avec Élise Chabin de Gai-logis, Nous valoriserons nos cultures et leurs diversités comme nous le faisons avec nos amis Marocains et Portugais….José Arturo , un ancien du bidonville du Franc-Moisin, qui fut longtemps délégué choisi par la Fédération mais aussi élus par les jardiniers (car nous ne voulions pas de délégués imposés par la direction fédérale nous voulions choisir nos propres délégués et faire notre propre règlement intérieur , cette position aurait d’ailleurs mérité des autorités politiques de notre territoire plus de soutien… mais ce n’était pas dans leur programme …Ils »faisaient confiance » (je dirai plutôt qu’ils n’avaient pas pris conscience de ce que représentait les »jardins ouvriers »)

Les ‘’jardins ouvriers’’ de la Plaine nous rappellent également que ce quartier fut longtemps un lieu où les travailleurs de différents pays se sont croisés partageant la solidarité ouvrière et parfois les luttes pour obtenir des droits nouveaux où tout simplement faire respecter les droits acquis….

En guise de conclusion : à la Plaine la mémoire ne peut oublier le passé vécu, il est un héritage non négligeable de notre histoire…. Les luttes contre le travail des enfants ou son aménagement dans les verreries ‘’Legras’’ il y a 150 ans, les luttes contre le racisme et pour la solidarité internationale au siècle dernier. Les luttes pour les conditions de travail chez Procol, Gibbs…. Les luttes pour l’emploi et le mieux vivre ensemble font partie de l’histoire que nous devons poursuivre.