Article actualisé. Le courrier du député, Stéphane Peu, au maire, Mathieu Hanotin. Retour en force des opérateurs de téléphonie mobile avec la 5G. Contraints par des mobilisations citoyennes, par la réglementation et des choix politiques locaux, ils bénéficient aujourd’hui du laisser-faire de la municipalité dionysienne et de Plaine Commune. Une pétition a été lancée

, par Michel Ribay

On entend parler régulièrement de l’installation de nouvelles antennes de téléphonie mobile. Et cela sans qu’a minima, une fois le projet entériné, une réunion d’information ne soit organisée comme en a le pouvoir la municipalité. Ici ou là, des panneaux fleurissent annonçant la pose d’antennes relais que les riverains d’un projet apprennent au moment où celui-ci est déjà bien avancé. Est-ce aujourd’hui bis repetita rue des Ursulines où Orange avait été mis en échec en 2007, ayant à l’époque dissimulé sa volonté d’y installer une antenne relais surplombant…une école maternelle, un collège et autres structures accueillant des publics fragiles. Rien n’est encore joué aujourd’hui – Orange n’a pas le feu vert d’une copropriété – mais déjà la mobilisation des riverains s’organise. Alerté par eux, le Blog de Saint-Denis fait le point sur le sujet.

Au cours des mandats précédents 2008-2014 et 2014-2020, avec la délégation à l’écologie urbaine de Plaine Commune animée par Michel Bougain, vice-président de Plaine Commune et maire de l’Ile Saint-Denis jusqu’en 2020 ; et le service de l’écologie urbaine à la ville de Saint-Denis, nous avons mené une bataille visant à réglementer l’installation des antennes relais sur Plaine Commune.

Notre objectif était que soit signée une Charte avec les opérateurs (SFR, Orange, Bouygues, puis Free) régissant les conditions d’installation d’antennes et visant à :
– la transparence quant aux projets des opérateurs
– l’information des citoyens
– la réalisation de mesures avant et après toute installation
– l’insertion paysagère des antennes
– et une politique de modération des émissions de champs électromagnétiques visant à la réduction des émissions sur la base d’un principe : les émissions les plus basses possibles tout en garantissant le bon fonctionnement du service.

Nous exigions le même traitement à Plaine Commune que ce qui avait été obtenu à Paris : une Charte négociée codifiant l’exploitation de la téléphonie mobile.

On ne parlait à ce moment de 4G encore moins de 5G.

Ce dernier point étant d’autant plus important que les technologies évoluant très vite et que le recours à des fréquences pour lesquelles il n’y a pas ni étude d’impact ni recul permettant d’évaluer les impacts en matière sanitaire imposent sinon un strict principe de précaution du moins des gardes-fous précis et controlés.

Nous avions obtenu, par la mobilisation et le rapport de force imposé aux opérateurs, la réalisation de 150 mesures sur l’ensemble de Plaine Commune afin d’objectiver la réalité des émissions.

Plaine Commune avait décidé par ailleurs que tant que les opérateurs ne signeraient pas une Charte sur la base des points précités il ne leur serait pas possible d’installer des antennes sur des bâtiments publics et sur le patrimoine du bailleur social Plaine Commune Habitat.

Cette politique a perduré jusqu’à la fin du mandat en 2020, même si la direction de Plaine Commune Habitat souhaitait lever ce moratoire, y voyant la possibilité de recettes supplémentaires. Un exemple : l’installation d’une antenne relais à la cité Pablo Picasso, au 5 allée Guernica, sur le patrimoine de Plaine Commune Habitat annoncée en décembre 2022 et mis en service, pour laquelle, selon nos informations, aucune réunion d’information n’a eu lieu ni de la part du bailleur, ni de la part de la municipalité.

Tout cela avait été rendu possible car, en tant qu’élus nous nous étions appuyés sur la mobilisation de collectifs de citoyens auxquels nous avions activement participé à Saint-Denis et à Plaine Commune et des associations nationales (Priartem, Robin des toits) ainsi qu’un réseau d’élu.es sensibilisé.es à ce sujet et ses implications technologiques, démocratiques et sanitaires.

Depuis 2020, la nouvelle municipalité et Plaine Commune, conduites toutes deux par le maire-président Mathieu Hanotin, n’ont pas reconduit cette politique de pression en direction des opérateurs.

Parallèlement, au fil des années, fruit des mobilisations précédentes, la réglementation sous la pression des associations et des élu.es a évolué. Les collectivités, les maires disposent de capacités d’actions – mêmes si elles sont limitées – vis à vis des opérateurs et les procédures d’installation d’antenne sont normées.

En ce qui concerne l’implantation ou la modification substantielle des installations radioélectriques, les maires ont un rôle clé en matière d’urbanisme et d’exposition du public aux ondes électromagnétiques.

En matière d’urbanisme, les maires doivent veiller au respect :
– des règles générales d’urbanisme et de celles du plan local d’urbanisme
– des règles de protection renforcées dans les secteurs protégés (secteur sauvegardé, site classé, réserve naturelle, etc.)

En matière d’exposition du public aux ondes électromagnétiques, les maires peuvent :
– valider les demandes de mesure d’exposition dans le cadre du dispositif national de surveillance géré par l’ANFR (Agence nationale des fréquences)
– faire réaliser des mesures sur leur territoire
– demander la réunion d’une instance de concertation départementale (ICD) lorsqu’ils estiment qu’une médiation est requise
– être représentés au sein du Comité national de dialogue relatif au niveau d’exposition du public aux ondes électromagnétiques, réuni sous l’égide de l’ANFR.

Par ailleurs, dans les établissements (mairie, médiathèque...) proposant au public un accès sans fil à internet, les maires doivent faire mentionner clairement à leur entrée l’accès WIFI au moyen d’un pictogramme.

Les maires reçoivent aussi les fiches de synthèse de l’ensemble des mesures d’exposition aux ondes réalisées sur le territoire de leur commune. L’ANFR est présente à leurs côtés pour apporter son expertise. Sur le site l’on peut consulter la carte d’implantations des antennes. Les mesures demandées sont réalisées par des organismes indépendants et financées par un dispositif spécifique.

L’action des maires auprès des opérateurs
– ils reçoivent et mettent à disposition des habitants les dossiers d’information mairie (DIM) transmis par les exploitants pour l’implantation ou la modification substantielle d’une installation radioélectrique
– ils peuvent exiger des exploitants une simulation de l’exposition aux ondes émises par une installation avant son implantation
– ils peuvent également exiger un état des lieux des installations existantes

Rien de tout cela n’est mis en œuvre aujourd’hui à Saint-Denis. A notre connaissance, aucune réunion d’information à l’initiative du maire en direction de riverains ne se sont tenus à l’occasion d’un projet, la municipalité pouvant toujours arguer sur tel ou tel projet qu’elle n’y est pas favorable mais cela reste un vœu pieux si elle se dispense de maintenir, construire et renforcer un rapport de forces vis à vis des opérateurs qui a été difficile à établir.

L’expérience a montré que les opérateurs ne comprennent que cela. La réglementation leur a été imposée.

La mobilisation citoyenne était parvenue à mettre en échec en 2007-2008 les opérateurs Orange et Bouygues pour leurs projets dissimulés d’antennes sous des motifs mensongers « d’installations de locaux techniques ». Cette mobilisation avait bénéficié du soutien d’un vice-président à Plaine Commune, Michel Bourgain et d’une écoute attentive à ce sujet émergent de la part de Stéphane Peu, alors adjoint au maire de Saint-Denis, Didier Paillard.

Il est à craindre que cela ne soit malheureusement plus le cas aujourd’hui du côté de la municipalité et de Plaine Commune, les signes négatifs, l’inaction des élu.es, le désintérêt vis à vis de cette question ayant pris le pas alors que beaucoup de maires dont 11 de très grandes villes se sont mobilisés en septembre 2020 sur le sujet.

Cela est d’autant plus problématique qu’il s’agit dans le cas de la 5G d’une technologie récente, écologiquement désastreuse, invasive, potentiellement liberticide et dont les effets sanitaires inquiètent.

Reste l’essentiel en pareil cas, la mobilisation citoyenne et en amont le choix des copropriétaires – du bâtiment envisagé, ciblé par l’opérateur – qui restent décisionnaires lors d’une assemblée générale à venir.
Des choix qui, quelquefois motivés par des aspects financiers tout compte fait limités, peuvent conduire à de très grandes tensions au sein de copropriétés, tensions et sujet de discorde inexistants avant les propositions toujours alléchantes et rassurantes des opérateurs. Un aspect dont il est toujours impossible d’en mesurer le coût avant de l’éprouver.

Une pétition a été lancée. Pour la signer c’est ici.

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