Bel hiver. Entre privatisation et expulsion le jeudi 16 décembre et l’opération Taubira le samedi 18.

, par Rosalie Merteuil

Jeudi 16 décembre. Privatisation et expulsion.
Conseil municipal. Tous les membres de la majorité municipale, qualifiée par Mathieu Hanotin, lors de son discours d’intronisation en juillet 2020, de femmes et hommes de gauche et de progrès, ont voté la première phase de privatisation du ménage et de l’entretien dans différents bâtiments municipaux.
Samedi 18 décembre. Opération Taubira.

Une première vague de personnes, très majoritairement des femmes, vont prendre la direction de pôle emploi. D’autres suivront au cours du mandat comme cela a été annoncé et défendu par le Maire, ses adjoints et l’ensemble de sa majorité.

Les arguments de l’opposition, que ce soit la défense du service public, la situation sanitaire ou la situation économique de ces personnes, que la fin de leurs contrats va jeter dans une grande précarité, n’ont pas été retenus.

Les femmes et hommes de gauche et de progrès ont adopté cette délibération qui va déstabiliser économiquement et psychologiquement de nombreux foyers. Ce n’est que le début, d’autres viendront et qui peut croire au fameux « accompagnement » promis à ceux qui perdent leurs emplois.

On se souviendra du résumé de ce dossier prononcé par Leyla Temel, adjointe de Mathieu Hanotin : « On assume de mettre fin à des CDD ».

Leyla Temel assume de mettre fin à des CDD comme Mathieu Hanotin assumera ce soir là de faire expulser par la police municipale une agente syndicaliste qui l’apostrophait du haut des tribunes. Du jamais vu.

Pour bien évaluer les conséquences de sa décision, on l’invite, ainsi que toutes les femmes et tous hommes de gauche et de progrès, à lire quelques passages de l’ouvrage de Florence Aubenas, le Quai de Ouistreham, récit de son immersion dans le monde des femmes de ménage et d’entretien.

Extraits.

« La principale qualité consiste à travailler vite. La société de nettoyage vend des heures de ménage aux différentes sociétés qui font appel à elle. Vous intervenez généralement hors de la journée de travail des autres employés, c’est à dire très tôt, ou très tard. Si vous vous accrochez, vous arriverez à trouver quelques heures le matin dans une boîte, quelques heures le soir dans une autre et, parfois, des contrats par à -coups au milieu. Il faut en vouloir pour évoluer. Les employeurs exigent des compétences. »

« — A Mondeville, vous nettoierez un magasin dans la ZAC de l’Etoile, le mardi et le mercredi de 9h30 à 10h30, vous laverez des sols, vous ferez les poussières, vous désinfecterez les sanitaires, vous viderez les poubelles. Savoir nettoyer les vitres à la raclette est un plus. […]. Contrat à durée déterminée de deux jours, deux heures au total. »

« — Cela dit, Laetitia, a déjà trouvé " autre chose ". Un fast-food à Blainville. Pas un travail, bien sûr, personne ne le croirait : aujourd’hui, on ne trouve pas de travail, on trouve "des heures ". »

Puis une fois la lecture achevée, sans trembler, entre la poire, le fromage, la dinde et le trou normand au soir du 24 décembre, reprenez en cœur, en famille pour certains, sans crainte pour l’avenir et sans regret : « Nous assumons de mettre fin à des CDD », ponctué de sonores Joyeux Noël. L’esprit est à la fête, on ne va pas s’apitoyer, alors on danse comme l’autre soir sur le parvis. Elu(e)s, membres du cabinet… C’est la fête.

Nous, on ne vous souhaite ni un Joyeux Noël, ni une Bonne Année. Rien, nada, walou, que dalle, comme une fin de CDD.

Samedi 18. Opération Taubira. Sauver la gauche ou ce qui reste du PS ?

Toujours Bel hiver. On enchaine lacrymo hier, cohue de journalistes aujourd’hui. A contrario des événements de la veille, tout est minutieusement préparé, minuté, orchestré. Sortie de l’hôtel de ville avec le maire, une haie d’honneur que Christiane Taubira salue comme l’élan enthousiaste de dionysiens venus spontanément à sa rencontre…

L’image peut sembler belle mais ce n’est qu’une image trompeuse. La haie d’honneur n’est constituée que d’élu(e)s : Shems El Khalfaoui, Adrien Delacroix, Danièle Glibert semble-t-il, Antoine Mokrane, Oriane Filhol (en arrière-plan), Leyla Temel, Corentin Duprey, Kamel Aoudjehane, Rabia Berraï.

Puis plus tard le cordon sanitaire se met en marche autour de Chistiane Taubira flanquée de Mathieu Hanotin, l’ex-député Daniel Goldberg, toujours Shems El Khalfaoui, Bertrand Revol, Katy Bontinck, PS et Génération.s bras dessus, bras dessous…

Cordon sanitaire et cordon sécuritaire qui parviendra, en jouant des coudes et des gros bras, à écarter sans ménagement une syndicaliste (la même expulsée manu militari de la salle du conseil municipal) de Christiane Taubira qui, bien que venue à la rencontre des dionysiens« parce que Saint-Denis est une des villes les plus pauvres » fera la sourde oreille aux interpellations qui lui ont été adressées concernant la privatisation votée jeudi au conseil municipal.

La veille, c’était branle bas de combat. Qui sera là ? Qui en sera ? Hidalgo lâchée, trahie par son staff ? Prévenir les télés, le buzz, l’usine à tweets est en marche, selfies à venir…

Tout ça pour quoi ? Exfiltrer Hidalgo ? Aujourd’hui Hidalgo résiste.

Sauvez la gauche avec ceux qui ont enterré ses valeurs ? Qui à ce stade peut y croire ?

A cette prétendue gauche lui faut-elle un sauveur ? Pourtant résonne à nos oreilles le début d’un couplet : « Il n’est pas de sauveurs suprêmes, Ni Dieu, ni César, ni tribun… ».

Alors que dire ? Toute cette opération va faire pschitt !

A cette prétendue gauche, par sympathie, on ne peut que souhaiter le meilleur et vite : des soins palliatifs.

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