Saint-Denis. La démocratie locale peau de chagrin, une dissymétrie totale de moyens entre la majorité et les élus d’opposition, des droits ignorés que reconnait pourtant la loi. Alors on se lève…

, par Rosalie Merteuil

Absence d’expression de l’opposition dans les supports numériques de communication (site et Facebook de la ville), non attribution de locaux aux conseillers municipaux non inscrits privés aussi de tribune dans le magazine JSD… A Saint-Denis, de fait, les droits de l’opposition municipale ne sont pas respectés. Pourtant la loi est claire en la matière. Plusieurs décisions de tribunaux administratifs en témoignent comme les réponses ministérielles à des questions écrites de député ou de sénateur. Revue de détail et preuves à l’appui.

Le dernier conseil municipal du 8 février fait l’objet d’un article du Parisien paru ce lundi 19 février. Il faut dire que ce conseil, s’il ressemblait sur bien des points aux précédents (mutisme des conseillers municipaux de la majorité et monopolisation de la parole par le maire et sa première adjointe, interventions répétés du Maire pendant les interventions des élus d’opposition), a connu un tournant. La coupe étant pleine pour les élus d’opposition, ceux-ci ont tous quitté le conseil municipal et publié un communiqué commun dénonçant « l’« autoritarisme et (le) mépris du Maire envers l’opposition municipale ».

Pour Le Parisien comme l’indique son titre « À deux ans des municipales, les tensions entre élus s’exacerbent à Saint-Denis ». Le titre est juste. Les tensions ne sont pas nouvelles. Et elles s’exacerbent non pas tant à l’approche – encore lointaine – des municipales mais bien parce que les conditions d’un véritable débat au conseil municipal sont loin d’être réunies et la multiplication des décisions du Maire et de sa majorité sans aucune concertation de la population et sans mandat lors de l’élection de 2020 pèse de plus en plus dans le climat général de la ville. Le conseil en est le reflet.

En fait, le Maire pratique à l’égard de son opposition comme il pratique à l’égard des administrés.
« Cause toujours » dit-il à l’opposition municipale, au pire je coupe le micro ; « Manifestez, pétitionnez tant que vous voulez » dit-il aux Dionysiens, moi, je n’en fais qu’à ma tête.

Des droits de l’opposition ignorés

S’agissant des droits de l’opposition, celle-ci devrait disposer sur le site de la ville et sur la page Facebook de la ville d’un espace d’expression. C’est la loi. Comme l’ont précisé les ministres à deux questions écrites posées par un député et un sénateur. Voir les documents à télécharger.

Concernant la mise à disposition de locaux, c’est aussi un droit dont devrait bénéficier les élus d’opposition non inscrits afin de recevoir les Dionysien.nes. C’est la loi. Comme en témoigne une note d’un cabinet d’avocat qui fait le point sur les droits de l’opposition. Voir le document à télécharger.

Concernant les tribunes dans le magazine JSD, seul le groupe d’opposition Saint-Denis à gauche a la possibilité de s’y exprimer. Force est de constater que ce n’est pas le cas des non inscrits, Mathieu Hanotin considère-t-il que Bakary Soukouna, Christophe Durieux ou Brahim Chikhi ne sont pas des conseillers municipaux comme les autres ?

Le magazine municipal JSD, le site de la ville, le Facebook de la ville sont des relais du Maire, de la politique municipale, de ses réalisations, de ses projets, de ses choix politiques.

En face de cela, une expression bridée de l’opposition au conseil municipal, 1500 signes tous les 15 jours dans le magazine pour le seul groupe d’opposition constitué. Quelle dissymétrie de moyens ! Et rien pour les non-inscrits.

La première adjointe, Katy Bontinck, non satisfaite de cette dissymétrie de moyens d’expression censure les commentaires sur son profil Facebook.

Un commentaire censuré (voir ci-dessous en cliquant sur le document) rend compte précisément de ce qui s’est passé le 8 février, contrairement à ce que Katy Bontinck affirme dans Le Parisien : « Le maire lui a demandé de revenir au sujet et elle n’a pas voulu. C’est le règlement : on doit faire des interventions en lien avec le point abordé. ».

Concernant le départ des élus d’opposition du conseil municipal du 8 février – après quatre années de mandature – Katy Bontinck parle d’une mise en scène de l’opposition pour « ne pas débattre de sujets où elle n’aurait pas été très à l’aise... ».

Cette assertion sans fondement est un écran de fumée. Une fois la fumée dissipée que reste-t-il de ses propos ?

Après la censure sur Facebook, une inexactitude grosse comme un camion : « Elle [ Katy Bontinck ] rappelle également que la mairie a mis en place un journal municipal avec « une tribune pour l’opposition, tous les quinze jours », de taille équivalente à celle de la majorité lit-on dans Le Parisien.

De taille équivalente à la majorité ? Franchement non ! La tribune du groupe succursale de la majorité autoproclamé « Ecologistes et citoyens ” fait bien partie de la majorité municipale ! C’est donc bien deux tribunes de la majorité et une de l’opposition.

Plus c’est gros plus ça passe ?

En fait tout ça ne passe pas. D’où l’exaspération de tous les élus d’opposition ce 8 février 2024.

Comme disait l‘autre : « Désormais on se lève et on se barre ».