Prox’aventure, la citoyenneté à coups de matraque - 1 / Raid aventure : La violence en service commandé

, par Jacques

En septembre 2022, une dizaine de classes de trois écoles élémentaires de Saint-Denis, du CP au CM2, ont participé à une animation sur le temps scolaire. Cette animation était présentée aux parents comme « Journée sportive et citoyenne ». En fait de sport et de citoyenneté, l’essentiel des ateliers proposait des activités violentes et/ou la manipulation d’armes. Une histoire de cette lutte a été publiée par les parents : Prox’aventure : Histoire d’une mobilisation contre la violence en milieu scolaire. Décryptage en quatre volets.

Bruno Pomart, le médiatique patron de Raid aventure

Flyer Prox’aventure pour les parents

Prox’aventure est un « dispositif » mis en place par l’association Raid aventure, dirigée par Bruno Pomart, un ancien du Raid. Bruno Pomart est un chouchou des médias (RMC, Cnews, BFM, Le Parisien…) et un habitué du ministère de l’Intérieur. Il est membre fondateur du think tank « transpartisan » « Initiative sécurité intérieure ». Par « transpartisan », entendre qu’il va de LR aux macronistes… L’objectif : faire entendre une voix « en défense des acteurs de la sécurité ».

En effet, Bruno Pomart prend le parti des policiers lorsque des violences particulièrement graves sont mises au jour (il dénigre par exemple les soutiens de la victime dans l’affaire Zecler [1] ; alors que les Gilets jaunes sont victimes d’une répression féroce dont témoigne Le mur jaune il met en place une cagnotte de soutien aux « policiers blessés »...). Bruno Pomart exprime son accord avec Eric Zemmour pour dire que « les violences policières, ça n’existe pas », « c’est un terme générique qui ne veut rien dire » [2]. Il affirme en octobre 2020 sur Cnews « Le Rassemblement national est […] beaucoup moins dangereux que la France insoumise ».

En dépit de l’image lisse qu’il cultive, Bruno Pomart est donc largement promu par la presse qui appartient à de puissants patrons pour vanter la politique du bâton, lorsque le bâton frappe le peuple.

Le financement de l’association

Son association est financée par Dassault (le marchand d’armes de guerre et patron de presse), la fondation Bettencourt (une des premières fortunes de France), GK Pro (marchand d’armes de répression intérieure, celles qui mutilent les manifestants), Andros (pour les petit-déj ???), diverses entreprises liées à la sécurité, mais aussi une ribambelle d’institutions étatiques (ministères de l’Intérieur, de l’Education nationale, des Armées, de la Justice, secrétariat général du gouvernement…).

Les logos de ces structures apparaissent lors des animations scolaires, en contradiction avec le principe de laïcité – et avec la morale, concernant des marchands d’armes. Bruno Pomart est donc largement soutenu par de grandes multinationales, celles qui décident de nos vies – et de nos morts, par les armes qu’elles commercialisent –, par l’État, qui défend les intérêts de ces groupes au détriment de nos vies.

Les objectifs affichés

Compétences maîtrisées en fin de CE1 : maniement de la matraque

Raid aventure s’adresse initialement à un public carcéral. Avec comme objectif la réinsertion des jeunes délinquants par la pratique d’expéditions viriles dans des contrées hostiles. Cela n’a guère eu d’incidence sur la délinquance ni sur la population carcérale passée en 30 ans d’activité revendiquée par l’association de 45000 à 70000. Une tendance inverse à celle de plusieurs pays voisins. Peut-être pourrait-on au contraire considérer que ce type d’association accompagne une politique sécuritaire de plus en plus répressive, tant contre la délinquance ordinaire que contre l’opposition sociale. La répression va de pair avec l’endoctrinement.

Le « dispositif prox », l’endoctrinement au plus jeune âge

Sport : maîtriser le plaquage ventral

Le « dispositif Prox », mis en place par Raid aventure, s’adresse aux jeunes des quartiers populaires (« certains quartiers en France », il sera aisé de comprendre desquels il s’agit). Dans les faits, à Saint-Denis il a été proposé dès le CP, même s’il semble cibler le plus souvent un public de collégiens. Il est censé « casser les stéréotypes » mais aussi accoutumer les jeunes aux contrôles de police (« maniement des bâtons de défense, menottage, palpation, techniques d’interpellation etc… ») « afin que lors d’un prochain contrôle, les gestes des policiers ne soient pas interprétés » et donne une large place au maniement d’armes et à la pratique d’actions violentes, ce qui est considéré comme une initiation aux « gestes techniques » des policiers (aucun rapport à aucun moment avec la citoyenneté mise en avant dans la communication).

Des séquences « débat » aboutissent à séparer les enfants en deux groupes, ceux qui disent « aimer la police », et ceux qui ne l’« aiment pas » (deux catégories qui n’ont guère de sens : de quelle police parle-t-on ?). Pour ceux qui ne l’aiment pas, les policiers expliquent que les violences policières n’existent pas et que si certains sont blessés, c’est qu’ils se trouvaient là où ils ne devaient pas [3]. Aucune réflexion sur le rôle de la police : on l’aime ou on ne l’aime pas, et si on ne l’aime pas on a tort. Vive le débat citoyen.

Citoyenneté : vivre sereinement son prochain menottage

Le visionnage de la vidéo d’autopromotion est encore plus explicite : la journée tourne essentiellement autour des armes et de la violence, avec des jeux de rôles entre enfants se courant après armés de matraques, pratiquant entre eux le placage ventral en se menottant dans le dos, dans la joie et la bonne humeur.

Et pourtant, aussi incroyable que cela puisse paraître, le modèle Prox’aventure ne pourrait se répandre sans la diffusion assurée par les élus locaux voire l’Education nationale.