A dix mois de l’élection municipale, état des lieux en mouvement

, par Michel Ribay

L’état des forces politiques dionysiennes et pierrefittoises, les configurations et alliances possibles en vue de l’élection municipale de mars 2026 sont loin d’être stabilisés. Si l’aspiration au rassemblement domine et apparait à l’ensemble des acteurs politiques comme indispensable pour tourner la page du mandat de Mathieu Hanotin les conditions pour y parvenir dès le premier tour ne sont pas encore aujourd’hui réunies. Etat des lieux.

Le paysage politique dionysien à gauche semble se structurer autour de trois espaces politiques. Le plus ancien est celui qu’occupent les partis politiques, principalement le PCF, LFI et plus récemment la Seine Saint-Denis au cœur.
Le deuxième, dans laquelle on retrouve là aussi des militants de partis politiques issus de LFI, du NPA et du PCF ainsi que de nombreux citoyens non affiliés est celui du comité local du Nouveau Front Populaire (NFP) créé dans la foulée des élections législatives de juin 2024.
Le tout dernier est celui du Collectif « On s’en mêle » qui fort de son appel signé aujourd’hui par près de 400 personnes entend porter la voix des citoyens dans la campagne de l’élection municipale et au-delà. Si chacun entend jouer un rôle spécifique dans la préparation de l’élection municipale, la convergence de ces trois forces, à un moment ou un autre, dans un cadre unitaire s’imposera pour offrir une alternative.

Du NFP à l’appel « On s‘en mêle », l’aspiration au rassemblement, la place des citoyens

Une convergence des forces qui apparait d’autant plus facile à réaliser que les frontières sont plus que ténues entre ces trois espaces. Tel ou tel militant politique, sympathisant peut très bien se réclamer et avoir investi chacun de ces espaces, partis, NFP et être aussi partie prenante de l’appel « On s’en mêle ».
Rien d’étonnant à ce que ceux qui se côtoient au sein de collectifs de luttes, bataillent ensemble autour des questions de logement, d’aménagement, des services publics, de la souffrance au travail des agents communaux et territoriaux, de l’école publique, des violences policières, du droit des étrangers, du féminisme, de l’antiracisme, de la lutte contre toutes les discriminations, pour la défense des droits humains et la solidarité internationale se retrouvent au sein de ces espaces politiques.

Les combats menés en commun, les leçons tirées – même si elles ne sont que partielles – de la défaite de 2020 devraient contribuer à la construction d’une démarche unitaire pour répondre à la forte aspiration au rassemblement exprimée à chaque occasion.

Qu’elle se soit plus récemment exprimée dans l’appel « On s’en mêle », au sein des réunions du comité local du NFP depuis près d’un an, au cours des trois réunions successives qui se sont tenues à l’école Jean Vilar les 19 décembre 2024, le 13 mai 2025 ou dès la réunion du 25 avril 2024 dont nous avions rendu compte sur le blog la question du rassemblement n’a cessé d’être proclamée, réaffirmée, exigée.

Outre cette question aujourd’hui encore non aboutie, nous soulignions dans notre article plusieurs enjeux : le périmètre de l’élargissement, la méthode de construction du programme, la place des citoyens dans ce processus et ce qu’il en serait de leur pouvoir au cours de la prochaine mandature.

Nous l’abordions de la sorte : « Comment construire démocratiquement un programme, comment les citoyens pourraient-ils s’en emparer si ils ne le construisent pas eux-mêmes et s’il n’est soumis qu’à l’imprimatur des organisations ? »

« Sans une attention constante à construire et fortifier le rassemblement, les logiques partidaires reprennent vite le dessus, gomment l’indispensable pluralité des points de vue, leur expression et leur incarnations et conduisent à passer à côté de ce qui permet une victoire : un retour critique sur le passé, l’élargissement, la coalition de tous les mécontentements, une stratégie partagée, une méthode démocratique de conduite de la campagne et… une vision de la nature de l’exercice du pouvoir municipal et des modalités de son contrôle, de son questionnement par les citoyens.

« Comment, dans un moment de profonde crise démocratique, de défiance citoyenne, comment gagner sans se fixer comme objectif de se tourner d’abord, dans la campagne qui s’ouvre, déjà ouverte, et vite, vers ceux qui ne votent plus, ne votent pas, sans construire des garanties d’exercice démocratique, de contrôle même, de la conduite des affaires municipales ? »

Ces questions restent d’actualité.

Un paysage politique en mouvement

Force est de constater qu’une grande partie de ces questions ne sont pas réglées à ce jour. Faut-il pour autant désespérer de la suite. Sûrement pas d’autant qu’au regard de 2020, depuis juin 2024 et dernièrement avec l’appel "On s’en même" le paysage politique s’est modifié, étendu, élargi à gauche. La victoire indispensable face à la municipalité actuelle en sort renforcée par extension du domaine de la lutte. L’avancée est incontestable car de nouvelles questions sont sur la table et font l’actualité avec l’apparition de nouveaux acteurs politiques.

Le comité local du NFP est né. En son sein se prolonge et se renforce la démarche unitaire d’autant qu’il offre avec la mise en place d’ateliers thématiques un cadre de débat, de réflexions, d’échanges, de construction du programme. Un premier bilan et les perspectives qu’il a ouvert peuvent se lire ici.

Ensuite l’appel « On s’en mêle » porte en toute clarté ces questions, les signataires les mettent au centre du débat public. Ce qui était balbutiant en 2020 s’exprime aujourd’hui avec plus de force et créé une dynamique, celle-ci pèsera d’autant plus fortement que le nombre des signataires progressera, sa représentativité s’élargissant à tous les quartiers et que la visibilité sur le terrain imposera cette démarche comme incontournable. C’était l’enjeu de la réunion qui s’est tenu le 25 mai dont un des animateurs de l’appel résumait la conclusion d’un mot, d’un impératif : faire.

Faire grossir le nombre de signataires, diffuser l’appel, dans son quartier, dans son réseau, toutes les initiatives sont bonnes à prendre, une plateforme d’échange créée, la dynamique lancée.

Du côté des partis… le PCF propose, LFI dit non

Si du côté des partis, les choses peuvent sembler plus statiques, voire figées, il faut y regarder de plus près.

La France Insoumise à travers des videos de son chef de file désigné Bally Bagayoko, des communiqués et les derniers posts parus sur son profil n’a cessé depuis des mois de réaffirmer sa position, sa ligne de conduite. S’appuyant sur les dernières consultations électorales – présidentielle, européennes, législatives – analysés comme une stricte dynamique en sa faveur tout en écartant le résultat des scrutins locaux – municipales de 2020 et départementales de 2021 – LFI entend prendre la tête d’une liste unitaire, écarte toute idée de primaire pour désigner une tête de liste et souhaite se réserver une très forte représentation pour LFI au sein de la liste comme garantie d’une majorité stable. Ces points présentés comme non négociables doivent se concrétiser par ailleurs dans un calendrier très contraint puisque la date de fin mai est présentée par LFI comme conclusive.

Du côté du PCF et de sa cheffe de file désignée, Sofia Boutrih, l’approche est différente, résumée et explicitée dans une lettre adressée tout récemment aux habitantset dont elle a fait part du contenu lors de la réunion du collectif « On s’en mêle » dimanche 25 mai. Une approche différente concernant le calendrier, la méthode de construction du programme, la désignation d’une tête de liste et la place faite aux autres forces politiques et citoyennes dans la composition de la liste.

La proposition de constitution d’une liste en trois tiers s’appuyant sur trois espaces politiques. Les partis PCF, LFI formant les 2 premiers tiers, la Seine-Saint-Denis au cœur – représentée à Saint-Denis par l’élu d’opposition Bakary Soukouna et Yasmina Bedar –, le NPA et des citoyens formant le troisième tiers. Une architecture de la liste aujourd’hui rejetée par LFI.

Faire converger des initiatives complémentaires

Cette proposition que fait sienne aujourd’hui publiquement Sofia Boutrih avait émergée du groupe d’opposition auquel appartiennent entre autres Bakary Soukouna et Romain Potel portant cette proposition de répartition par tiers et s’opposant à ce qu’un seul parti puisse au sein d’une liste avoir la majorité à lui tout seul.

Une proposition que nous n’hésitons pas à qualifier d’ouverte, d’équilibrée même si cette notion a été plus que galvaudée par Mathieu Hanotin et sa majorité municipale monolithique aux ordres.

Une dynamique citoyenne, indispensable pour gagner s’accommode peu de la verticalité et du calendrier des partis. Autrement dit si le temps presse, il ne faudrait pas confondre vitesse et précipitation.

S’attacher à constituer une liste plurielle, y faire vivre dès maintenant une dynamique préfigurant une autre gouvernance constitue le premier acte d’une volonté partagée : celle de la rupture.

A ce stade, il faut faire converger toutes les initiatives qui vont dans le bons sens : les portes à portes effectués par LFI, la diffusion de l’appel « On s’en mêle », la prise de position publique de Sofia Boutrih, la mise en place d’ateliers thématiques dans le cadre du NFP, autant d’éléments complémentaires qui constituent des points d’appui pour le rassemblement.

Puisse le débat se prolonger sans invectives inutiles, avec mesure, sérieux et en gardant sans cesse à l’esprit l’objectif commun. C’est de la responsabilité de tous.

A ce stade et à court terme une inconnue subsiste sur laquelle en revanche nous n’avons pas prise, qu’en sera-t-il de l’Assemblée nationale dans un mois ?

Pour le reste, c’est entre nos mains.